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  • Par delà les brumes

Le but de l’apprentissage : La saison de la Reine


La première année d’apprentissage de l’école de Morgan Le Fay se termine à l’automne avec la saison de la Reine. C’est le dernier archétype que nous étudions et la fin naturelle du cycle. Quel est le but finalement ? C’est de se réapproprier cet archétype et de ressentir au plus profond de nous la présence de la reine.


Tant de femmes se diminuent encore et toujours. Enfant face aux professeurs et aux instructeurs, adolescentes face à l’industrie de la beauté et de la mode, adulte face aux injonctions toujours plus contradictoires. Les influences numériques se sont ajoutées aux demandes sociétales et persistent à agiter sous le nez des femmes un objectif de « femme épanouie » en pratique inaccessible.

Morgen nous inspire à incarner la reine. Débarrassée des fausses demandes, des injonctions et des limites qu’elle n’a pas choisies. Sans compromission. « Unapologetically herself » disent les anglais (« être elle-même sans aucune excuse»).

Je me souviens de la première fois que j’ai abordé ce dernier module. Une angoisse bien connue qui m’a étreint le cœur. Nous ne sommes pas formées à être unapologetically ourselves. Nous sommes entrainées depuis le plus jeune âge à nous conformer, faire ce qu’on attend de nous sans nous enseigner la possibilité de faire nos propres choix à l’âge adulte.

On nous demande d’être sexy sans aguicher, d’être belle sans être superficielle, intelligente mais pas prétentieuse, serviable mais de bonne humeur, mère mais sans s’oublier. Au fur et à mesure que l’on grandit la liste s’allonge et les modèles se succèdent, tous aussi différents les uns que les autres. On nous dit finalement d’être nous-mêmes, mais pas trop bizarres quand même. Les influences autour de nous n’aiment pas vraiment que l’on sorte d’une certaine norme. Le dernier chapitre commence sur ces termes, Morgane demande à ce que la reine en nous s’exprime. Elle ne se satisfera pas de moins. Les femmes qui sont attirées par ce chemin se trouveront en condition de devoir l’exprimer face au monde. J’en avais été assez terrifiée. C’est plus rassurant de se fondre dans la masse. Si on ressemble à tout le monde on risque moins d’être critiquée, on risque moins d’être seule, on risque moins d’être abandonnée….Je me souviens d’avoir ouvert le premier texte, d’avoir senti mon cœur vouloir s’échapper de ma poitrine de peur. Je me suis presque sentie malade d’angoisse.


Et en même temps j’ai perçu toute la justesse du propos. L’île d’Avalon est régie par des femmes. Morgane en est la souveraine mais elle est entourée de neufs sœurs, un collectif de reines qui gouvernent ensemble, sans compétition féminine. Leur île est tout de même un petit peu cachée dans la brume, à l’abri des regards hostiles, ce qui leur permet probablement de travailler tranquillement à être elles-mêmes sans disruption. Avant de se présenter au monde telles qu’elles sont dans toute leur diversité et leur unicité. Dans l’imaginaire collectif, Avalon est l’île des femmes, le lieu où elles viennent apprendre des compétences essentielles avant de retourner dans le monde social.


Le chemin de prêtresse d’Avalon nous emmène de mille différentes façons vers cet objectif-là. Dans le business du spirituel il y a évidemment certaines représentations de prêtresses parfaitement réalisées, toujours souriantes et spirituelles, vêtues de bleu et de paillettes toute l’année. Je crois que le voie à suivre est bien plus terre à terre. Le chemin d’Avalon tel que je l’ai parcouru toutes ces années passe par les marécages de l’inconscient et des peurs, voire des terreurs, il demande de crapahuter avec de la boue collée aux semelles à travers toutes les limitations qui constituent tous les êtres humains. Il demande de grimper avec efforts comme on grimpe inlassablement le Tor, essoufflée et rouge, en ayant mal aux cuisses, avec le vent qui hurle de plus en plus fort. Il demande d’oser traverser l’inconfort encore et encore. On ne nait pas reine, pourrait-on dire, on le devient.


C’est quand on a compris ce qui nous influence que l’on peut faire de nouveaux choix, et oser petit à petit cette posture. S’apprécier et se respecter, oser demander le même respect de la part des autres. Dans ma vie professionnelle j’observe tant de femmes qui souffrent au quotidien de ces manques de respect petits ou grands. Les enfants qui leur parlent mal, le mari qui se moque de leurs passions, la belle-mère qui en demande toujours plus sans jamais demander s’il y a suffisamment de temps pour cela, les amies qui critiquent…être la reine c’est finalement se choisir au détriment de ce que préconisent les autres et les habitudes sociales. C’est ne pas tolérer qu’on nous impose des restrictions inutiles et délétères qui entravent notre âme.


Pendant que j’écris cet article ma fille de 9 ans me rejoint avec une histoire qui semble tomber à point nommé. Elle a enlevé la belle robe qu’elle avait mise pour sortir le dimanche et mis un t-shirt et un short gris. Lorsqu’elle arrive je lui demande pourquoi elle s’est changée ; j’apprends que sa sœur de 13 ans lui a dit que la robe n’allait ni à son corps, ni à sa tête. Je lui parle alors de mon thème de la journée. Qu’est-ce que la reine répondrait ? Douterait-elle de la puissance de ses envies juste parce qu’une autre personne lui fait un commentaire négatif ? Donnerait-elle les pleins pouvoirs à quelqu’un qui passe par là pour donner un avis qu’on ne lui a pas demandé et qui n’a aucune légitimité ? J’essaie de lui expliquer que c’est l’histoire de nombreuses petites filles qui rencontrent encore et toujours ce type de situation, adultes elles finissent par vivre une vie sans joie, sans choix car elles se sont habituées à toujours enlever la robe qu’elles aimaient pour mettre des vêtements tout gris. Elles ont perdu le plaisir de porter leur belle robe, mais qu’ont-elles gagné ? Cela les a-t-il seulement mises à l’abri d’autres réflexions négatives ? C’est une histoire banale des filles, des femmes (et très souvent des hommes aussi, mais j’aime bien écrire pour les femmes) qui se répète encore et toujours.


Au fil de l’histoire, la tradition chrétienne a petit à petit modifié les récits liés à Morgane la Fée pour lui donner le rôle de la méchante, de la femme ambitieuse et dangereuse. Pour l’époque médiévale elle est devenue un contre-exemple. Dans la nôtre son influence peut avoir l’effet inverse, elle montre la voie de la reine, celle qui ne craint pas son propre pouvoir et qui demande le respect d’elle-même et des autres femmes. Car les légendes les plus anciennes ne font pas de Morgane une ennemie de ses congénères. Au contraire cette notion de sœurs qui règnent ensemble reflètent plutôt une des très réelles capacités de la gent féminine : l’entraide, la sororité, la transmission. La reine Morgane règne avec d’autres, elle enseigne à d’autres, elle couronne les autres femmes. C’est un des aspects essentiels de la tradition d’Avalon réinventée, elle se partage et se transmet pour qu’ensemble, ses nouvelles prêtresses se soutiennent pour se sentir pleinement, de plus en plus souvent et quel que soit leur âge, dans la saison de la reine.


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