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  • Par delà les brumes

Qui sont-elles, les prêtresses d'Avalon ?

Dernière mise à jour : 6 avr. 2023


Est-ce qu’on peut réellement croire que ce peut être une voie spirituelle moderne ? Vingt ans en arrière la religion était reléguée presque au rang de folklore dans la culture. Aujourd’hui le retour de religions traditionnelles et son lot de dogmes d’autres âges ainsi que le développement de tous les types de spiritualité montrent que les sociétés humaines peinent à se passer de la transcendance.


Dans la culture occidentale, le mot de prêtresse n’évoque plus grand chose. De vagues souvenirs de cours d’histoire ou de romans de fantasy de pure imagination.

Quel chemin spirituel pour les femmes en quête d’absolu à l’évocation de la lande celtique où, par-delà les brumes, officient des groupes de femmes proches de la nature et du caractère sacré de leur propre féminité? Vers qui peuvent-elles se tourner lorsqu’au fond de leur cœur elles ressentent un appel, la nostalgie de quelque chose qu’elles n’ont pourtant pas connu, une émotion vive face à un paysage, une image, une musique et le besoin d’être connectée à la terre, à l’univers, de vibrer à l’unisson du cosmos.

Les religions traditionnelles offrent aux femmes une version extrêmement limitée de l’absolu. Elevée loin des églises et pourtant en recherche spirituelle dès l’enfance, je me suis spontanément tournée vers ce que je pouvais trouver autour de moi. Des représentations féminine, en souffrance ou en extase, plutôt immobiles et loin du monde. Une forme de spiritualité en bleu et blanc mettant à l’honneur la douceur, la gentillesse, l’acceptation indiscutée et indiscutable d’un destin souvent tragique. Pas vraiment de représentations de femmes de la vraie vie.


Je n’étais ni bonne ni douce. Dans ma jeune et vague conception du monde spirituel j’ai essayé de me conformer à la seule expression du sacré que je pouvais trouver : la calme résolution de Marie, la douceur incarnée, immobile, silencieuse et le regard toujours inspiré. En parallèle mes héroïnes de contes et de dessins animés correspondaient à peu près aux mêmes valeurs et aux mêmes attitudes : Cendrillon, Blanche Neige, toujours aimables malgré leurs malheurs. J’adorais ces princesses, je leur trouvais tellement de vertus d’opposer toujours à la méchanceté la gentillesse et la patience, et d’en être récompensées à la fin. Je me suis évertuée pendant toute mon enfance à leur ressembler. Mais je n’étais ni bonne, ni douce.


A cette époque déjà, je n’y parviens pas, je suis trop en colère, trop triste, mon côté sombre prend trop de place. Je fais tout ce que je peux pour ressembler aux modèles sages, pardonnant toutes les agressions, aimant sans condition. Je n’y arrive pas. Ma colère ne s’est pas beaucoup estompée. Avec le recul je me demande quelle est cette mascarade. J’ai toujours été émue par les chapelles à Marie et les supplications des visiteurs. Mais est-ce que c’est sérieux de proposer ce modèle depuis 2000 ans à la moitié de l’humanité ? Une femme vierge, mais mère (au temps pour une inspiration à suivre), qui se laisse enlever son seul fils pour le voir mourir, à qui on réserve le seul rôle de pleurer gentiment pendant et après sa mort. Voilà la figure spirituelle féminine qui guide les âmes depuis 2000 ans en Occident. Quelques saintes par-ci, par-là, guère plus heureuses, martyres, stigmatisées, emmurées. Le renouveau des autres « grandes » religions ne semble pas non plus apporter un grand souffle à l’expression féminine : femme diminuée, femme cachée, femme amputée, femme voilée, dissimulée, cantonnée. Les noms des dieux et les rituels changent mais la place de la femme dans ces récits demeure singulièrement la même : au mieux sage et limitée à servir les autres, au pire impure de par sa féminité, stigmatisée, punie et dressée à l’obéissance.


Il manque clairement des aspects au modèle féminin de ces traditions. Je n’en avais probablement pas conscience à l’époque mais il n’est guère surprenant que ma quête m’ait menée au-delà des frontières de cette proposition étriquée.


Ni vierge, ni mère, ni aimant inconditionnellement, ni prête au sacrifice ou au pire pour me résoudre à une souffrance silencieuse, il me fallait compléter cette construction du féminin sacré.


Qui sont les prêtresses d’Avalon ? Aucune source écrite, aucuns vestiges archéologiques ne nous permet d’en fixer une tradition historique. Avalon est l’expression d’un mythe fondateur, d’un appel à l’inconnu et la source de ce qui est plus grand que nous. Mentionné pour la première fois autour de l’an 1000, ce nom fait référence à Annwn, l’Autremonde celtique, le lieu d’où viennent les âmes et où elles reviennent après leur vie humaine. Cependant les histoires et les contes font référence de nombreuses fois à des femmes prêtresses, druidesses, oracles, femmes qui servaient la nature du divin.


Dans toute l’histoire de l’humanité il y a eu des prêtresses, depuis l’antiquité jusqu’à l’établissement des religions monothéistes. Il fut un temps où l’équilibre du monde se retrouvait naturellement dans les représentations religieuses et spirituelles : Dieux et Déesses, prêtres et prêtresses… jusqu’à ce que cet aspect ne soit réduit à une minorité. Il n’est pas question aujourd’hui de reprendre des traditions historiques qui n’étaient pas beaucoup plus au service de l’épanouissement des femmes, mais plutôt de se rendre compte que dans la représentation spirituelle moderne, il y a un vide depuis des siècles qu’il est peut-être temps de combler.

Quel chemin spirituel pour les femmes en quête d’absolu ? La tradition moderne des prêtresses d’Avalon entend finalement restaurer un équilibre et répondre de façons variées à cette question. Il est indéniable que nombre de femmes ressentent cet appel, que quelque chose manque dans notre modernité : vers qui se tourner lorsque l’on ressent cet appel de l’absolu ? Lorsque l’on franchit une étape de vie de femme ? Lorsque l’on a ses premières règles, lorsque l’on est enceinte, après la naissance, lorsque l’on est jeune fille ou lorsque l’on devient vieille.

Dans une société qui n’a plus la rigidité des règles et des rituels sociétaux forts, on ne peut toutefois pas se satisfaire du vide, au risque de perdre le sens et de risquer de devenir une proie pour des vendeurs de bien-être ou de compétitions de beauté, d’apparence, de nouveaux modèles instagrammables mais qui n’ont pas de substance.


Quel est le rôle des prêtresses d’aujourd’hui ? En quoi cette orientation qui peut paraître folklorique à certains peut représenter une voie spirituelle puissante, inspirante, sacrée et épanouissante ? Comment peut-elle inspirer des femmes en les libérant des dogmes limitants des millénaires passés et des temps modernes, et en leur redonnant toute leur puissance, leur expression et leur célébration à la fois intérieure et sociétale ?


La prêtresse utilise les archétypes, le folklore, les mythes comme un support de représentation de son lien avec la Déesse, la Mère Universelle, la Terre, l’Univers…. Quel que soit le nom qu’elle souhaite lui donner. Elle entretient la flamme de la dévotion et peut ainsi aider d’autres à faire de même.


La prêtresse donne de la valeur à la féminité, à la vie, aux cycles de l’année, de la nature, de la Terre, et des passages de vie par l’art de la cérémonie. Collective ou individuelle la beauté partagée de rituels simples ou élaborés permet de retrouver le sens qu’on veut donner à l’existence, de reconnaitre le passage du temps, de valoriser les étapes de vie et de progression.


La prêtresse, au cours de ces cérémonies ou individuellement joue le rôle de témoin des événements, des passages de la vie, des peines, des réussites. Elle maintient l’espace (en anglais on dit she holds space). Elle permet ainsi aux personnes présentes avec elle de recevoir le reflet de leur propre ressenti et de l’histoire de leur propre vie. Dans notre société moderne où nous nous retrouvons souvent seuls face aux épreuves et aux transformations de vie (deuils, séparations… ) il nous manque souvent les témoins neutres permettant la reconnaissance de l’événement, la mise en récit et en sens dans notre parcours de vie et ainsi la transformation du sens à donner à cette étape.


La prêtresse, par le long travail d’introspection et de compréhension d’elle-même et de la nature humaine qu’elle a mené pendant plusieurs années, a apprivoisé la part d’ombre de la nature humaine, elle ne craint pas sa propre part d’ombre, ses hontes, ses défaillances, ses craintes les plus intimes. Elle ne prétend pas que toute cette partie d’elle-même n’existe pas. Elle ne se prétend pas être uniquement amour et lumière. Elle peut guider les autres parce qu’elle a déjà défriché son propre chemin, elle peut ainsi comprendre, accepter et transformer.


La prêtresse symbolise un retour à l’équilibre du masculin et du féminin perdu dans la spiritualité occidentale depuis des siècles. A la différence que dans notre société moderne qui permet enfin son expression, elle peut enfin redonner une modèle de femme affranchie des demandes extérieures, un exemple de femme puissante et libre, capable de faire ses choix et de les imposer, capable de faire face aux défis de sa vie et de se les approprier. La prêtresse permet l’imaginaire d’une femme qui ne se cantonne pas à la douceur effacée mais qui assume d’être un volcan en éruption, qui accepte de mécontenter les autres dans sa sphère privée comme professionnelle pour préserver sa flamme, une héroïne qui n’est pas seulement un personnage sur le chemin du héros mais qui accomplit elle-même sa légende personnelle et qui choisit ce qu’elle doit être.


Enfin la prêtresse guide sur le chemin de l’amour de soi. En permettant d’aller au-delà des modèles sociétaux inaccessibles, elle redonne à chaque femme sa place et sa valeur par rapport à ce qu’elle est déjà, en validant ses aspirations et son expression personnelle, elle permet à chaque femme de retrouver l’amour et l’admiration de ce qu’elle est au fond d’elle et d’en travailler l’expression.


Alors on peut considérer que c’est un peu folklorique d’aller fouiller dans ces vieilles histoires médiévales à la recherche de récits encore plus anciens, on peut trouver que c’est un peu étrange de chercher à s’identifier à des mythes et des Déesses sortis du fond âges pour en développer le partage sur internet.

Pourtant la seule question qui mérite finalement l’attention c’est dans quelle mesure cette tradition renouvelée et réinventée sert les femmes qui se sentent appelées ? Y trouvent-elles l’inspiration, la force, les modèles qui peuvent les accompagner pour valider leurs choix, trouver la confiance, oser rencontrer la flamme qui brille au fond de leur cœur, accepter de s’aimer quand leur vie leur a parfois suggéré pendant des décennies le contraire ?


Les pays anglo-saxons me paraissent souvent plus libre d’explorer des idées farfelues mais le nombre de femmes qui s’intéressent malgré tout à cette voie même en France semble bien confirmer toute la valeur que l’on peut y trouver. Sans règles oppressives, sans dogmes inhibants, la voie ouverte par les anglo-saxons semble bien trouver un écho dans des femmes de toutes les cultures qui cherchent à retrouver un chemin vers elle-même, vers une spiritualité qui leur parle de leur beauté, de leur puissance, de leur valeur sans y mettre de condition. Cette réponse semble même être à certains moments un élément essentiel des questions de notre époque tourmentée.

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